GRAND ANGLE: thriller (French Edition) by Rémont Vincent

Auteur:Rémont, Vincent [Rémont, Vincent]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2023-06-18T23:00:00+00:00

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Nuit du mardi 31 juillet

La première sensation qui lui parvint en ouvrant les yeux fut la soif, une soif impérieuse, violente, pire que celle d’un lendemain de cuite. Il avait l’impression que tout l’intérieur de sa bouche, de sa gorge était sec et que son palais était sur le point de se craqueler comme le sol du désert des Mojaves. Le goût était quant à lui comparable à celui d’un animal mort depuis plusieurs jours. Il eut un haut-le-cœur qui lui vrilla le crâne et tout son corps se réveilla d’un seul coup. Des douleurs lancinantes le terrassèrent sans qu’il puisse les identifier ni même les localiser. Malgré le nombre de fêtes décadentes durant lesquelles il s’était parfois retrouvé impliqué dans une bagarre sans le vouloir, il ne se rappelait pas s’être réveillé un jour dans un tel état de délabrement physique. La souffrance l’empêchait de réfléchir ou d’émettre le moindre mouvement et il ignorait où il se trouvait exactement. Mais une chose était sûre, c’était la soif qui l’avait mené jusqu’ici. Une autre soif.

Il ne se souvenait de rien, du moins de rien de ce qu’il s’était passé dans la journée ou la soirée. D’ailleurs, il n’avait aucune idée de l’heure qu’il était, et tenter de se concentrer revenait à exciter les aiguilles à tricoter qui lui perforaient déjà la tête. Des aiguilles bien affutées qui crevaient chacune de ses nouvelles pensées comme de vulgaires ballons d’anniversaire. Enfant, dans les baptêmes, les mariages et toutes les cérémonies ennuyeuses, il se faisait un plaisir de les éclater à pieds joints juste pour faire peur à ses petites cousines. Il avait toujours eu un goût différent de la fête, une autre vision, comme si c’était inscrit dans ses gênes. À l’âge de dix ans, il s’amusait déjà à allumer des pétards avec le briquet de son père. Bon, c’était lui qui les tenait et les jetait, mais il aimait ça. Ou alors il les ensevelissait sous un tas de terre ou dans une boîte. Quelques années plus tard, au lycée, il préférait les fumer et se faire éclater le cerveau.

Il aurait pu en rester là, se contenter de son petit joint journalier, fumé dans l’arrêt de bus du village, comme la plupart de ses camarades. Il y en avait beaucoup plus que l’on ne pensait, à l’époque. Mais non, il avait déjà cette avidité en lui, le « toujours plus ». La surenchère. Sa consommation s’était très rapidement accrue. Même s’il bossait en tant que saisonnier pendant la plupart des périodes de vacances chez des amis de ses parents qui étaient agriculteurs, ses économies s’amenuisaient en conséquence.

Il s’était très vite associé avec deux de ses camarades afin de récolter une grosse somme d’argent qui leur permettait d’avoir une quantité de shit plus importante. Il vendait des parts ridicules à des gamins qui n’y connaissaient pas grand-chose, moins que lui en tout cas. Et quand la somme de départ était remboursée, ils se partageaient le reste. Ça leur assurait leur consommation. Bien évidemment, l’opération s’était répétée maintes et maintes fois.

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